Les textes de la messe de ce dimanche nous proposent de méditer, en premier lieu, sur la figure du pasteur, mais aussi, à travers elle, sur celle de la brebis.
Le prophète Jérémie rapporte les exhortations que Dieu fait aux pasteurs de son peuple : « si vous ne vous occupez pas de mes brebis – dit le Seigneur – moi, je m’occuperais de donner mon troupeau à un autre ». Le pasteur, en effet, n’est pas pasteur pour lui-même. Et il en va de même de tous ceux qui exercent une forme d’autorité.
Le mot « autorité »… Encore de l’étymologie, chouette ! Le mot « autorité » a la même racine latine que le mot « auteur ». Celui qui exerce une autorité, c’est celui qui est à l’origine, à la base, à la source de quelque chose. Mais à la source de quoi ?
Celui qui est autoritaire, c’est celui qui donne des ordres, qui commande de façon impérative. L’autoritaire, c’est celui qui est à la source de commandements. On parle alors souvent d’« autoritarisme ». Mais est-ce là le sens plénier et fort de l’autorité, ou n’en serait-ce pas seulement une forme, en réalité, diminuée, tronquée, voire rabougrie ?
L’auteur, lui, se fait connaître par son œuvre.
C’est même la grandeur de l’œuvre qui permet de prendre conscience du génie de
son auteur. Ce qui fonde l’autorité d’un chef ou d’un créateur, ne n’est pas
quelque chose d’intrinsèque à lui, mais, au contraire, le déploiement de ses
compétences en dehors de lui, vers les autres. L’autorité véritable n’est pas
ordonnée à celui qui la détient, elle ne prend tout son sens que si elle est
mise au service de la croissance d’autrui. Voyez l’exemple du patron de notre
paroisse : saint Jean-Baptiste. Il jouissait d’une grande aura, mais ça n’était
pas pour l’exaltation de sa personne : dès qu’il eut aperçu l’Agneau de Dieu,
il le désigna et, depuis lors, s’effaça. Voilà la véritable autorité : sans
équivoque.
C’est pourquoi Dieu condamne les pasteurs qui n’ont pas pris soin du troupeau à eux confié et qui, plutôt que le rassembler dans l’unité, selon les mots de saint Paul aux éphésiens, n’ont cherché qu’à le rassembler chacun autour de soi et, de ce fait, l’ont morcelé, divisé et, finalement, dispersé. L’autorité des pasteurs doit toujours être ordonnée au bien du troupeau.
Mais le bien du troupeau, ce n’est pas le bon plaisir de tel ou tel de ses membres ; le bien suprême du troupeau, c’est d’être finalement réuni autour du bon Pasteur : Jésus lui-même. Dans l’évangile, nous voyons justement Jésus, avec ses disciples, se mettre à l’écart de la foule et se rendre d’une rive à l’autre du lac de Tibériade. Mais la foule ne voulait pas être séparée de lui : la voilà qu’elle part, elle aussi, par la rive, à la suite de Jésus. Les brebis doivent être avides de suivre leur pasteur pour d’entendre sa voix et ses enseignements.
C’est pourquoi, les fidèles peuvent, mais doivent aussi solliciter les biens spirituels auprès de leurs pasteurs. Être chrétien, vivre en chrétien, ce n’est pas faire le strict minimum : venir à la messe une fois par semaine – à peu près – et dire à ses proches qu’on veut passer à l’église pour ses obsèques. Être chrétien, c’est courir après Jésus, c’est contourner tous les obstacles qui se mettent entre lui et nous et, une fois que nous l’avons trouvé, ne pas le lâcher !
Nous devons – et ça vaut aussi, et même surtout, pour les prêtres ! – nous devons être avides de la présence de Jésus. De sa présence sacramentelle, mais aussi de ses enseignements. En venant à la messe et en écoutant l’homélie, vous avez les deux ! Mais ce n’est qu’une partie de tout ce qui nous est offert : Jésus est là tous les jours, toute la journée, dans le tabernacle, avide, lui, de notre présence.
À l’exemple de la foule dans l’évangile, lançons-nous à la suite du Christ. Que les pasteurs sachent se donner entièrement pour les brebis qui leur sont confiées, mais que les brebis sachent aussi se montrer dociles aux pasteurs que Dieu leur donne et promptes à se laisser enseigner, avides de cultiver la proximité sacramentelle, spirituelle et intellectuelle avec Jésus.
Amen.