Accéder au contenu principal

Homélie pour le 4e dimanche de Pâques (B) : dimanche du « Bon pasteur »

 La sainte liturgie nous propose de méditer, ce dimanche, sur la figure de Jésus en tant qu’il est le bon pasteur et, du même fait, de méditer sur la figure du prêtre.

Jésus est l’A et l’Ω, comme il le dit lui-même dans le livre de l’Apocalypse et comme cela est inscrit sur le cierge que nous avons solennellement bénit dans la sainte nuit de Pâques ; Jésus est le commencement et la fin. Mais ici, sous la plume de saint Jean, il affirme encore être le bon pasteur, c’est-à-dire celui qui accompagne ses brebis sur le chemin, de son commencement à sa fin, de leur origine à leur destination.

Dieu n’est pas seulement en lien avec nous comme le créateur qui aurait donné au monde une impulsion primordiale, un peu à la manière dont on lance un ballon, ou dont un joueur de billard ouvre la partie en tirant la boule blanche pour casser le triangle et projeter les autres boules. Il n’est pas non plus seulement en lien avec nous en tant que cause finale, fin de notre vie et de toute la création, qui nous attire inexorablement à lui et dont tout concourt à achever l’avènement, à la façon dont toute l’eau du monde ruisselle en définitive inexorablement vers les océans. Jésus se révèle encore à nous comme étant le bon pasteur, c’est-à-dire un accompagnateur de son peuple depuis le commencement de sa route et jusqu’à la fin des temps ; il est toujours présent au milieu de ses brebis et concourt activement à leur salut. Il n’est pas seulement leur origine et leur fin, leur raison d’être, mais il leur offre encore les moyens de toucher à leur fin, c’est-à-dire parvenir à lui. C’est pourquoi nous avons chanté dans le psaume « Mieux vaut s’appuyer sur le Seigneur que de compter sur les hommes, que de compter sur les puissants ». Dieu est le Tout-puissant qui nous garde.

Or, c’est la grandeur de l’homme que d’avoir une ressemblance avec Dieu. Dieu créa l’homme à son image, c’est-à-dire capable d’être le principe de ses propres actions, de faire des choix libres. C’est encore pour manifester cette noblesse de l’homme que Dieu daigna assumer la nature humaine en la personne de Jésus pour se révéler parfaitement à nous. C’est encore par égard pour la dignité de l’homme que Dieu co-opère avec les hommes ; il « agit avec » eux.

C’est donc notamment par la médiation d’autres hommes que Dieu garde son troupeau, qu’il le conduit, qu’il le fait paître. Conduire le troupeau, le nourrir sacramentellement et doctrinalement, voilà la mission des pasteurs du Christ, tout comme Moïse, ainsi que cela nous a été donné à voir pendant le Carême, guidait le peuple hébreu dans le désert, l’instruisait et le sanctifiait. Voilà les trois charges qui incombent aux pasteurs, à l’imitation de Jésus, charges autour desquelles s’articule toute l’activité de l’Église, notamment le ministère sacerdotal.

« Si on comprenait le prêtre – disait le saint Curé d’Ars – on en mourrait non de crainte, mais d’amour ». Comment le comprendre ?

Voyez le récit des Actes des apôtres. Un miracle a eu lieu. On interroge saint Pierre : « qu’as-tu fait ? » Réponse : « c’est par le nom de Jésus que ce miracle a eu lieu, moi je n’ai rien fait ». Pierre n’a pas élaboré de stratagème, il n’a pas cherché à démontrer son ingéniosité pastorale, il a simplement annoncé ce qu’il a vu : le Verbe de Dieu fait homme, mort et ressuscité pour notre salut. Quand le prêtre enseigne, il enseigne le Christ ; quand il donne les sacrements, il donne la vie du Christ, quand il conduit le peuple, il le conduit au Christ, qui donne sa vie par amour. Toute l’œuvre du prêtre, c’est de donner l’amour de Dieu en vérité. Et la vérité suprême, c’est que notre vie n’est ici-bas qu’un passage, et que notre patrie se trouve dans les cieux.

C’est la raison d’être du célibat consacré en vue du royaume des cieux, imitation de Jésus jusque dans son dépouillement le plus total par la renonciation à des joies naturelles parmi les plus légitimes en témoignage de l’espérance que nous ne sommes pas bornés dans le monde présent. Les missionnaires rapportent souvent que, dans les pays de mission, le célibat des prêtres, des religieuses, des religieux, est le témoignage qui marque le plus les populations. C’est encore un gage de la disponibilité du pasteur, tout donné à son troupeau. C’est une renonciation et une offrande de soi en vue de la joie immense d’être un outil mystérieusement à la fois actif et inutile dont se sert le Christ pour communiquer sa vie au monde.

Le prêtre, configuré au Christ Jésus, disposé à agir en tout point comme lui par le rite de l’ordination, est un autre Christ au milieu du troupeau des fidèles et, à l’image de son modèle, le bon pasteur, il se doit d’être bon.

Le prêtre n’est pas là pour être gentil. Alors, ça ne gâte rien ! Mais il est là avant tout pour être bon, c’est-à-dire pour conduire les brebis à lui confiées vers le bercail du Christ, afin qu’elles y jouissent du plus grand des biens : le repos en la présence divine. Et pour cela, il faut parfois dire des choses qui rebutent notre sensibilité blessée par le péché, mais cela procède de la véritable charité. Car c’est la charité qui anime tout le ministère du pasteur qui sait être lui-même docile à son modèle, non un amour des hommes purement naturel. Et parce que cette charité est toute tournée vers la vie éternelle, si nous la possédions activement, elle nous y ferait entrer instantanément. Voilà pourquoi le Curé d’Ars disait que l’on mourrait d’amour.

Alors prions pour les prêtres, prions pour leur sanctification qui nous sanctifie nous-mêmes, prions pour ceux qui se destinent à le devenir et qui y sont appelés par l’Église. L’éclosion des vocations est la grâce suprême d’une paroisse ; quelle plus grande joie, en effet, pour le peuple chrétien, que d’enfanter par ses prières un autre Christ sorti de lui, à la façon dont la Vierge Marie a vu sortir son propre Créateur de ses entrailles. C’est la grâce qu’il nous faut instamment demander en ce dimanche.

Seigneur, donne-nous des prêtres !
Seigneur, donne-nous de saints prêtres !
Seigneur, donne-nous beaucoup de saints prêtres !

Lire les textes du jour



Commentaires