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Homélie pour le 5e dimanche après Pâques

 En ce moment, vous l’aurez sans doute remarqué, on parle beaucoup, sur internet, sur les réseaux sociaux, de développement personnel et de motivation. J’en parlais encore justement l’autre jour avec plusieurs d’entre vous.

Beaucoup de formateurs autoproclamés viennent vous vanter les mérites de leur style de vie, vous promettant qu’en les imitant, vous arriverez, comme eux, à développer vos capacités physiques et intellectuelles, et surtout à renforcer votre détermination à réaliser tous vos projets. Tous partagent avec vous leurs techniques de motivation pour rester concentrés sur la poursuite de leurs objectifs, vidéos à l’appui !

On vous propose de renforcer votre physique, et c’est très bien. On vous propose de renforcer aussi votre esprit : de « booster votre mental », comme on dit, c’est très bien aussi. Mais dans tous ces discours, il manque pourtant toujours une dimension essentielle : celle de l’esprit entendu non pas comme une machine à ingurgiter des informations et les traiter, un peu comme le ferait un ordinateur ; mais de l’esprit en tant qu’il est ce qui nous permet de comprendre profondément le sens des choses, leur raison d’être, et en tant qu’il est le siège de notre liberté. L’esprit en tant qu’il est cette faculté la plus haute de notre être, propre à l’homme, et que c’est là que se trouve la ressemblance que nous avons avec Dieu, qui nous a créé à son image, dit la Genèse, en nous donnant la faculté d’agir librement, de faire des choix, d’être le principe de nos actions, contrairement aux animaux qui ne sont mus que par l’instinct.

Et pour pouvoir agir librement, il faut être capable de poser des actes qui correspondent à nos choix. C’est pourquoi il est bien légitime, chers amis, de vouloir développer ses capacités physiques et mentales, qui sont nécessaires pour agir : si vous voulez passer des épreuves sportives, par exemple, ou des examens scolaires, vous devez en effet vous y préparer.

Mais je vous inviterai ce matin à toujours vous poser la question du sens des choses : pourquoi est-ce que je veux faire ça ? Qu’est-ce que j’en attends ? À quoi cela me mènera-t-il ? Parce qu’être libre, ce n’est pas nécessairement pouvoir faire ce vers quoi nous portent nos inclinations immédiates, mais c’est avant tout être capable de chercher le bien, rechercher ce qui est profondément bon, et le poursuivre. Les animaux ne cherchent pas ce qui est bon, mais ils sont naturellement mus de l’intérieur, portés par leur instinct vers ce qui est bon pour eux, ils ne se posent pas de question. Nous les êtres humains, au contraire, sommes doués de la raison, qui nous permet de sortir de nous-même, et d’aller à la rencontre objective du monde, et de le comprendre.

Et bien cette dimension spirituelle supérieure de l’homme, pourtant essentielle, vous ne la trouverez presque jamais abordée dans tous les contenus qui prétendent pourtant vous aider à développer la plénitude de votre potentiel. Or, c’est celle-là qui nous rend à la fois spécifiquement humains et qui nous permet d’accéder à ce qu’il y a de divin en nous. Cette partie de notre être ne s’observe pas, elle ne se filme pas, elle ne se « post » pas avec un smiley sur les réseaux, mais elle se vit.

Et c’est justement de la motivation pour cette vie que nous parle ce matin un influenceur, à sa manière, qui s’appelle Jacques. Jacques n’a ni chaine youtube, ni compte instagram, mais, puisque c’était un des disciples de Jésus, qu’on appelle les « apôtres », il a laissé une lettre dans la Bible, ce qui est tout de même beaucoup mieux. Et c’est un extrait de cette lettre que nous avons lu.

Jacques nous parle de bonheur et de liberté. Et il dit que le bonheur n’est pas dans les choses qui passent. Le bonheur, en effet, par définition, est une situation durable, c’est pourquoi il ne peut se trouver dans le seul fait de profiter des biens qui finiront par disparaître un jour ou l’autre, comme le sont la plupart de ceux qui nous entourent et qui finissent toujours soit par être consommés, soit par nous lasser. Saint Jacques nous exhorte plutôt à méditer sur notre liberté, à réfléchir au fait que nous sommes capables de choisir ce vers quoi l’on veut tendre, et que nous ne sommes pas esclaves de nos passions.

Mais alors, me direz-vous, que devons-nous désirer ? Qu’est-ce qui nous rendra parfaitement heureux ? La réponse générale, qui convient à tous les êtres humains : c’est Dieu. Dieu seul peut nous rendre parfaitement heureux. Mais la vision de Dieu, chers amis, vous le savez, n’est pas pour la vie présente, mais pour la vie future. Que faire alors ici-bas ?

Hé bien il faut toujours répéter la première prière que nous avons faite au début de cette messe : il faut reconnaitre que le Bon Dieu est l’auteur de tous les biens, et il faut lui demander de nous éclairer et de nous guider dans le choix de ceux que nous devons poursuivre. C’est à ça que sert la prière, la méditation. « Demandez, dit Jésus dans l’évangile, et vous recevrez, afin que votre joie soit parfaite ». La prière, chers amis, n’est toutefois pas une liste au père Noël : Jésus ne nous dit pas de demander à Dieu tout ce qui nous passe par la tête. Mais commençons par demander à Dieu ce qu’il attend de nous dans cette vie. Demandez-lui ce que vous devez faire de votre vie. N’ayez pas peur ! N’ayez pas peur de confier votre vie au Christ, avait dit le pape Jean Paul II à la jeunesse de France lors d’un de ses voyages à Paris. Parlez-lui ! Parlez à Jésus dans la prière, et décelez dans votre cœur les inclinations qu’il y mettra. Surtout, demandez-lui de désirer ce qui est juste, comme nous invite à le faire encore l’Église dans la dernière prière de cette messe. Accordez-nous, Seigneur, de désirer ce qui est juste. Inspirez-nous, Seigneur, pour que nos pensées se portent vers ce qui est bien et que notre volonté l’accomplisse.

Restez donc toujours libres, chers amis. Libres par rapport au siècle présent, libres par rapport au monde, libres par rapport aux modes, libres par rapport au conformisme. N’ayez en vue que ce qu’il y a de meilleur et de plus haut, et tâchez de l’obtenir, afin que votre joie soit parfaite.

Amen.